Le Goulot d’Étranglement : Prièste cartographie les frictions entre le Port d’Abidjan et la mobilité urbaine

Le mois de juillet est traditionnellement une période de bilans académiques. Au Lycée et École Supérieure Prièste, c’est le moment où nos laboratoires de recherche finalisent et publient leurs analyses stratégiques. Cette année, les projecteurs sont braqués sur notre Observatoire de la Logistique et du Commerce Ouest-Africain (OLCAO), qui livre une étude décisive sur l’un des défis économiques majeurs de la Côte d’Ivoire.

Le Port Autonome d’Abidjan (PAA) est notre plus grand atout. C’est la porte d’entrée et de sortie de la quasi-totalité de notre économie et celle de nos voisins de l’hinterland (Mali, Burkina Faso). Mais si le PAA est performant à l’intérieur de ses terminaux, sa véritable efficacité est mise à rude épreuve chaque jour, à ses portes.

Notre nouvelle Note d’Analyse Stratégique, dirigée par le Dr. Thierry Blanchard (Professeur en Supply Chain) et fruit d’une collaboration inédite avec notre Pôle IA (PAD-Lab), met des chiffres précis sur ce que tout logisticien à Abidjan sait intuitivement : le port et la ville sont en collision.

La Donnée Inédite : Croiser le Formel et l’Informel

Le problème n’est pas nouveau, mais la manière de le mesurer l’est. Jusqu’à présent, les analyses de la congestion portuaire se sont concentrées sur les temps d’attente des navires ou les durées de dédouanement. Notre étude s’est concentrée sur ce que nous appelons le “corridor de sortie” : le kilomètre critique qui sépare la barrière du terminal de conteneurs des grands axes routiers de la ville.

Pendant douze mois, nos équipes ont fusionné deux ensembles de données que personne n’avait jamais croisés à cette échelle :

  1. Données Formelles (OLCAO) : Nous avons analysé (en partenariat avec des transitaires) les journaux de sortie anonymisés de plusieurs milliers de camions porte-conteneurs, en nous concentrant sur l’heure exacte de “validation de sortie”.
  2. Données Informelles (PAD-Lab) : Nous avons utilisé les millions de points de données GPS collectés lors de notre projet de cartographie du transport informel (le projet “Modéliser l’Impossible”).

Le Dr. Blanchard et le Dr. Aminata Diop (Responsable IA) ont superposé ces deux mondes. Les résultats sont sans appel et quantifient la friction.

Les Chiffres du Blocage : La Collision de 17h00

L’analyse de nos étudiants du MSc in Business Analytics révèle un “conflit d’horaires” structurel qui coûte des millions à l’économie nationale.

Notre modèle de clustering temporel démontre que le pic des sorties de camions du PAA se situe entre 15h30 et 18h00. C’est le moment où les transitaires, ayant finalisé les procédures douanières dans la journée, lancent leurs camions sur les routes vers les entrepôts de Vridi ou les corridors internationaux.

Or, ce pic de sortie de “flux lourds” (camions) entre en collision directe avec le pic de saturation du “flux léger” (Gbakas, Woro-woro) qui ramènent les travailleurs chez eux. Les données GPS de notre PAD-Lab montrent que l’activité des Gbakas sur le Boulevard VGE et les axes adjacents explose précisément à partir de 16h30.

Le résultat est un blocage total. Notre algorithme a calculé un “temps mort” moyen de 3 heures et 45 minutes pour un conteneur entre le moment où il passe la barrière du port et celui où il atteint le carrefour de Vridi (une distance de quelques kilomètres seulement).

Ce n’est pas un embouteillage ; c’est une paralysie économique. Ce temps mort se traduit directement en surcoûts (carburant, usure, frais de surestarie indirects) qui sont, in fine, payés par le consommateur ivoirien.

Des Pistes de Solution : Vers un Port “Context-Aware”

Le Lycée et École Supérieure Prièste ne se contente pas de poser des diagnostics. Notre rapport propose des pistes de réflexion concrètes, basées sur nos propres technologies.

La solution n’est pas seulement dans le béton (plus de routes), mais dans la donnée.

1. L’Ordonnancement Dynamique (Dynamic Scheduling) : Plutôt qu’un système de sortie “premier arrivé, premier servi”, nous avons modélisé un “système de créneaux intelligents”. En utilisant notre algorithme de prédiction du trafic informel (développé par le PAD-Lab), le PAA pourrait créer des “fenêtres de sortie vertes” pour les camions. Il s’agirait d’inciter (par exemple, via une tarification différenciée) les transporteurs à sortir leurs conteneurs non urgents à 22h00 ou à 05h00 du matin, lorsque le réseau urbain est fluide.

2. Le Défi de la Coordination : Le rapport souligne que le problème n’est pas technique, mais organisationnel. La direction du PAA, la Mairie de Treichville, les syndicats de chauffeurs de Gbakas et les syndicats de transporteurs de conteneurs opèrent en silos.

L’étude n’a pas été facile à mener, et ses résultats sont parfois difficiles. Ils suggèrent que l’optimisation interne du port ne sert à rien si elle n’est pas synchronisée avec l’écosystème externe de la ville.

En publiant cette note, le Lycée et École Supérieure Prièste réaffirme sa mission : former des managers et des ingénieurs qui ne voient pas seulement leur entreprise (le port, la banque, l’usine), mais qui comprennent comment cette entreprise s’insère dans le système complexe et vivant qu’est Abidjan.


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