La mission de notre Pôle “Design Numérique et Création Multimédia” au Lycée et École Supérieure Prièste a toujours été claire : former des créatifs qui répondent aux besoins urgents de notre écosystème ivoirien. Nous privilégions le design fonctionnel, l’UX/UI inclusif et les solutions légères, adaptées aux contraintes de bande passante et aux usages mobiles de nos concitoyens.
Mais comment cette philosophie pragmatique dialogue-t-elle avec les standards mondiaux de la production 3D, notamment ceux de l’industrie du divertissement (cinéma et jeu vidéo) ? Pour le découvrir, une délégation de nos meilleurs étudiants de troisième année de Bachelor Design, accompagnée de nos intervenants experts, M. Yacouba Traoré (Spécialiste Motion Design & 3D) et du Dr. Eva-Marie Bamba (Responsable du Pôle), s’est envolée pour la Nouvelle-Zélande.
Leur destination : le campus de l’Aevena Pavilon International Polytechnic College (APIPC), situé au 105 St Georges Bay Road, dans le quartier de Parnell à Auckland.
Auckland : La Capitale de l’Illusion Numérique
La Nouvelle-Zélande, et Auckland en particulier, est un hub mondialement reconnu pour les effets visuels (VFX) et l’animation 3D, abritant certains des studios les plus influents de la planète. L’Aevena Pavilon International Polytechnic College (APIPC), avec son “School of Creative Industries”, forme l’élite technique qui travaille sur ces productions.
La rencontre a été organisée avec les étudiants et les formateurs du “Diploma in 3D Animation & Visual Effects”. L’objectif de nos professeurs était de confronter nos “pipelines” (chaînes de production) de création. Ce fut un choc méthodologique aussi intense que productif.
Le Choc : L’Optimisation d’Abidjan face au Photoréalisme de Parnell
La première journée du séminaire a mis en lumière nos différences fondamentales.
M. Yacouba Traoré et nos étudiants ont présenté leurs projets phares : la modélisation 3D “low-poly” (basse définition polygonale) de sites du patrimoine ivoirien pour des applications de réalité augmentée (AR) sur smartphones standards. Ils ont détaillé leurs contraintes : l’optimisation extrême des textures, la réduction drastique du nombre de polygones, la nécessité de garantir la fluidité sur des appareils aux performances modestes. Le Dr. Bamba a complété en montrant comment ces créations 3D s’intègrent dans des interfaces UX/UI centrées sur l’accessibilité.
Puis, ce fut au tour d’APIPC. Nos étudiants ont assisté à la projection des “demo reels” (bandes démo) de leurs homologues néo-zélandais. Ce que nous avons vu était d’un autre ordre : des créatures photoréalistes, des simulations de fluides et de destructions dignes de blockbusters, des rendus d’une complexité inouïe. Leurs formateurs parlaient de “render farms” (fermes de rendu), de “ray tracing” en temps réel et de “shaders” complexes.
Leurs contraintes ne sont pas la performance sur mobile, mais le photoréalisme absolu exigé par le cinéma.
“Honnêtement, le premier soir, nos étudiants étaient un peu secoués”, a confié M. Traoré. “Ils avaient l’impression que nous n’étions pas dans la même discipline. Eux sculptent des monstres pour Hollywood ; nous, nous codons des interfaces pour des coopératives agricoles.”
La Convergence Inattendue : L’Efficacité et l’Émotion
Le deuxième jour, lors d’un workshop technique, tout a basculé.
Un formateur d’APIPC, spécialisé dans le jeu vidéo, a disséqué les modèles 3D “low-poly” de nos étudiants. Il a arrêté la présentation et a pris la parole : “Ce que vous faites là,” a-t-il dit en pointant l’optimisation d’une texture, “c’est exactement ce que l’industrie du jeu mobile, qui pèse des milliards de dollars, recherche désespérément. Mes étudiants savent créer une image magnifique qui prend 10 heures de rendu. Ils ne savent pas créer une image efficace qui tourne à 60 images/seconde sur un téléphone.”
Cette intervention a tout changé. Nos étudiants ont réalisé que leur compétence, née de la contrainte ivoirienne, n’était pas un sous-produit du design, mais une expertise de pointe recherchée au niveau mondial.
En retour, l’équipe de Prièste a trouvé une inspiration majeure. Le Dr. Bamba a été marquée par les conférences d’APIPC sur le “Visual Storytelling” (la narration visuelle). “Nous avons vu comment ils utilisent la lumière, la couleur et le cadrage pour créer de l’émotion,” a-t-elle expliqué. “Nous nous concentrons tellement sur la fonctionnalité de nos applications inclusives que nous en oublions parfois l’engagement, l’émotion, le plaisir. Pourquoi une application destinée au secteur informel devrait-elle être austère ? L’efficacité n’exclut pas la beauté.”
Le Futur : Le “Low-Poly” avec l’Âme d’un Blockbuster
Nous ne sommes pas revenus d’Auckland en voulant imiter la VFX néo-zélandaise. Nous sommes revenus en sachant que nos deux mondes sont complémentaires.
Le Lycée et École Supérieure Prièste est fier d’avoir initié ce pont. L’avenir de notre Pôle Design se dessine : former des créatifs ivoiriens qui maîtrisent l’optimisation technique la plus pointue, tout en y injectant la puissance narrative et émotionnelle des meilleurs studios du monde.

Leave a Reply